Plaidoyer pour le renforcement des droits des femmes, actrices de la lutte contre le dérèglement climatique : Bilan de l’Accord de la COP 21
Un groupe de travail Autonomisation des femmes et Enjeux climatiques, co-présidé par la Présidente du Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE) et les Présidentes des délégations aux droits des femmes de l’Assemblée nationale et du Sénat (Danielle Bousquet, Catherine Coutelle et Chantal Jouanno) a élaboré un document de plaidoyer, intitulé Les Femmes actrices de la lutte contre le dérèglement climatique , auquel ont participé l’OIF, l’AFD, le Ministère des Affaires étrangères, le CEPED, le centre Virchow-Villermé, CARE, Adéquations, Equilibre et Populations et l’Unesco.
Ce plaidoyer constituait la base d’un Appel intitulé « Soutenir les femmes face au dérèglement climatique : pourquoi nous nous engageons », et sollicitant l’inscription du principe de l’égalité femmes-hommes dans l’Accord de Paris, et la reconnaissance et le renforcement de la participation des femmes des pays en développement dans les décisions et projets en matière de lutte contre le dérèglement climatique.
Les 3 co-Présidentes ont remis l’Appel, signé par plus de 100 personnalités françaises et internationales, au Président de la COP 21 Laurent Fabius, et aux Ministres Marisol Touraine et Pascale Boistard lors d’un évènement organisé le 16 octobre, au Ministère des Affaires étrangères.
Le Ministre Laurent Fabius a réservé un accueil très favorable à cette démarche et s’est déclaré prêt à porter fidèlement les principales recommandations, ajoutant que « la bataille contre le changement climatique doit prendre en compte la question de l’égalité femmes hommes ; l’égalité concrète, réelle, doit figurer dans l’Accord de Paris ». Il n’a cependant pas masqué la difficulté d’amener les 196 parties à un consensus dans une négociation aux multiples enjeux.
L’évènement « Climat : les femmes s’engagent » co-organisé par le Ministère des Affaires étrangères, le Secrétariat d’Etat aux Droits des femmes et les 3 co-Présidentes (HCE, DDF Assemblée nationale et Sénat) a été un succès tant par la qualité des interventions et témoignages au cours des deux tables rondes, que par le nombre et la mobilisation des participant.e.s. Les tables rondes ont permis de présenter les réalisations de femmes entrepreneures et actrices françaises, ainsi que l’expérience et les analyses d’actrices de pays du sud et d’Organisations internationales. Il a bénéficié d’une bonne couverture de presse.
Intervenant.es invité.es :
Yannick Glemarec, Directeur exécutif adjoint, ONU Femmes
Anne Catherine Husson Traore, Directrice Générale, Novethic
Myriam Maestronni, Présidente d’Economies d’énergies
Martine Laruaz Présidente Isidore,PME rénovation énergétique
Anne-Marie Descôtes,Directrice générale de la mondialisation, des partenariats, et du développement (MAEDI)
Michaëlle Jean, Secrétaire générale de la Francophonie
Fatima Denton, Directrice du Centre sur les politiques Climat de l’UNECA
Yves Charbit, Professeur honoraire de Démographie, Paris-Descartes
Colette Bénoudji, ONG Lead Tchad
L’appel a été ensuite ouvert à la signature du public sur le site www.femmesetclimat.fr.
Le HCE a participé à une série d’évènements en amont et pendant la COP 21 (zone bleue et Espace Générations climat), pour y présenter le plaidoyer et l’appel, en partenariat avec les membres de la Plate-forme Genre et Développement.
Bilan suite à la conclusion de l’Accord de Paris le 12 décembre 2015
Le HCE porte une appréciation globalement positive sur le résultat des négociations, considérant que l’accord est en soi un succès, car les divergences entre les 196 (195 Etats + Commission pour l’UE) étaient réelles.
Pour ce qui est de l’avancement de l’égalité femmes-hommes et de l’autonomisation des femmes, nous prenons acte des progrès, même si nos recommandations visaient un champ et un niveau d’engagement plus vastes.
Notre première satisfaction est de voir la mention explicite du « respect par les Etats de leurs engagements en matière de Droits humains, …, d’égalité des sexes et d’autonomisation des femmes », dans le préambule de l’Accord de Paris (et de la Décision 1/CP.21). Comme nous l’avions relevé, le texte de la Convention-cadre des Nations-Unies contre les changements climatiques, puis le Protocole de Kyoto, ne comprenaient aucune référence à la dimension sociale/humaine, comme pilier du développement durable.
Autre avancée : la double mention de l’« approche tenant compte du genre » (en anglais « gender-responsive », plus forte que « gender-sensitive / sensible au genre ») sous les articles de l’Accord relatifs à l’adaptation (Art 5.2) et au renforcement des capacités (Art. 11.2), qui constituent deux points importants.
En revanche, la question de la parité dans les organes et les délégations, évoquée sous plusieurs décisions de COP antérieures, n’est rappelée qu’en termes peu allants dans la Décision (pt 103) sur « la prise en compte de l’objectif d’équilibre de genre » (NB pas l’égalité) dans la formation du Comité chargé de superviser la mise en œuvre et l’observation des engagements de Paris.
Aucune avancée sur les financements : nous avions formulé des recommandations plaidant l’intégration du genre dans les financements consacrés à la lutte contre le dérèglement climatique. La version finale de l’Accord ne comprend aucune mention du genre sous ce volet essentiel, bien que le terme « gender-sensitive » ait figuré un temps dans le texte en négociation. Enfin le mot genre n’a jamais pu être introduit au chapitre des transferts de technologies.
L’on relèvera enfin que près d’une cinquantaine de pays ont fait mention du principe d’égalité des sexes ou de projets y ayant trait dans leurs INDC/ Contributions nationales soumises par les Etats. Et divers engagements ont été annoncés par des coalitions d’Etats, de collectivités territoriales et d’entreprises, en particulier sur le développement à grande échelle des énergies renouvelables, qui devraient directement ou indirectement bénéficier aux femmes (gain de temps et amélioration de leur capacité de génération de revenus).
Il reste une solide marge de progression sous la Présidence française, puis sous celle du Maroc en novembre 2016. Le HCE entend poursuivre son plaidoyer notamment sur les volets financements et accès aux technologies renforçant l’autonomie des femmes.